Les canons à neige : sauveurs des stations ?.

Pour contrer les chutes de neige de moins en moins précoces et les précipitations en recul, les stations de sport d’hiver sont de plus en plus nombreuses à mettre en place des canons à neige, à conditions que les températures soient suffisamment froides. Et ce n’est plus réservé de nos jours aux grandes stations des Alpes ou des Pyrénées. Dans l’Ain, on s’y est mis également comme l’an passé sur le domaine d’Hauteville la Praille même si pour cette station de moyenne altitude les pistes n’ont fonctionné qu’une dizaine de jours. Dans un proche avenir, des canons apparaitront sur le plateau du Retord. Cela fait plus de 50 ans que le premier canon à neige a fonctionné en France sur une piste de 550 m au Champ du Feu dans le Bas Rhin. 20 ans plus tard en 1973 Flaine fut la première station européenne à s’équiper. Utilisé pour assurer un enneigement suffisant des pistes, ce procédé est actuellement en fort développement en début de saison dès la mi novembre parfois, de manière à assurer la période de ski, et l’ouverture de la station à date fixe, le souvent vers la mi décembre comme dans c’est le cas dans l’Ain. Certains rares sites de ski d’été sur glacier en sont également équipés même si leur avenir est de plus en plus incertain avec le réchauffement climatique. De manière plus globale, ces systèmes d’enneigement sont positionnés sur les pistes principales et donc les axes principaux des domaine skiables. En France en 2009, 20 % des pistes étaient équipées de canons à neige, ce qui au final n’est pas exceptionnel. Avec ces canons à neige, l’enneigement artificiel permet d’augmenter ou du moins maintenir le nombre de jours de pratique du ski et de permettre le retour vers les stations skis aux pieds quand la neige manque sur les pentes les plus basses ou sur les liaisons vers les zones plus longtemps enneigées du domaine. Il existe à l’heure actuelle trois types de techniques pour enneiger les domaines : des canons ventilateur ou monofluide, des canons et perches air et eau ou bifluide et enfin les canons tous-temps qui produisent de la neige à partir de particules de glace obtenues par congélation d’eau par n’importe quelle température externe avec l’aide de machines frigorifiques. Les canons air et eau utilisent des compresseurs centralisés qui fournissent l’air comprimé nécessaire à la nucléation et/ou à l’atomisation de l’eau. Les canons ventilateur produisent eux-mêmes leur air comprimé grâce à un petit compresseur embarqué qui ne sert qu’à la nucléation. Dans les deux cas un réseau d’eau sous pression est nécessaire, sa pression sera fonction du dénivelé de l’installation d’enneigement. Pour obtenir la cristallisation (ou nucléation), on mélange de l’eau avec de l’air comprimé, à l’intérieur de « canons » de petit gabarit. La tête des enneigeurs air et eau est généralement placée en hauteur (de 2,5 à 10 mètres) afin d’assurer un temps de chute suffisant (balistique) pour permettre aux gouttelettes d’eau de changer d’état. Le canon ventilateur assure la balistique nécessaire à la génération de neige par le biais du flux d’air froid produit par son gros ventilateur.

L’ajout dans l’eau d’une bactérie, Pseudomonas syringae (souche 31 R), naturellement présente dans certaines eaux et sur certains végétaux, mais dont d’autres souches peuvent être très phytopathogènes, peut aider à la nucléation de la neige. Cette bactérie, commune, a la propriété de faire geler l’eau à plus de 0 °C, ce qui suppose-t-on lui permet d’agresser et pénétrer les végétaux qu’elle infecte. En France, ce procédé n’est pas utilisé, à la suite de l’engagement pris par l’ensemble des domaines skiables de renoncer à tout type d’adjuvant dans la neige de culture.

On ne produit pas de la neige quand on veut. Différents paramètres entrent en jeu et ils influencent bien évidemment sur la fabrication mécanique de la neige : la température dite sèche tout d’abord, le taux d’hygrométrie, la pression atmosphérique, la température de l’eau, la couverture nuageuse, les conditions de vent.

La corrélation entre température sèche et taux d’hygrométrie donne la température humide qui est celle qui importe quand on veut fabriquer de la neige (voir diagramme de l’air humide).

Il est encore possible de produire de la neige à partir de ?2 °C humide (?2 °C sec et 100 % d’hygrométrie) avec les canons à neige les plus modernes, mais le rendement globale de l’installation reste, à ces valeurs extrêmes, a des valeurs très faibles. Les meilleurs résultats sont toujours obtenus avec une hygrométrie inférieure à 50 % et une température extérieur au environ de moins dix degré. En effet, en cas de saturation hygrométrique les gouttelettes n’arrivent pas à se cristalliser complètement et tendent à geler en éclaboussant le sol. La production d’une neige mouillée forme de la glace. Au contraire, lorsque le taux d’hygrométrie est très bas (de l’ordre de 30 à 40 % par exemple), il est possible de fabriquer de la neige à plus de 0 °C (mais 1 à 2 °C au maximum). En effet, l’eau, en s’évaporant, se refroidit, selon les tables psychrométriques.

La température de l’eau est très importante: plus elle est froide, plus la cristallisation est rapide, et il est quasiment impossible de faire fonctionner un enneigeur de manière satisfaisante (c’est-à-dire avec un rendement acceptable) avec une eau de température supérieure à 4°C. En effet, la variation des caractéristiques de la molécule d’eau n’est pas linéaire en fonction de la température, et nécessite une énergie trop grande au-delà de cette température. L’utilisation de coupe-pressions et le frottement de l’eau dans les conduites tend à réchauffer l’eau, ce qui rend sa cristallisation plus difficile et donc la neige ainsi produite plus humide. La pression tend à augmenter le débit en neige des enneigeurs.

Un ciel couvert peut empêcher la neige de se former, car l’air va en être légèrement réchauffé, car il n’y a plus de refroidissement de l’air.

Si le vent est orienté vers la sortie de l’enneigeur, il va se déposer de la neige qui va geler sur la bouche de l’enneigeur, ce qui va finir par le boucher et l’abîmer.

Un mètre cube d’eau permet de produire entre 2 et 2,2 mètres cubes de neige de qualité moyenne.

Produire de la neige pour faire plaisir aux skieurs c’est bien mais ce n’est pas sans conséquences notamment sur l’environnement, outre le bruit dégagé par le matériel qui perturbe les riverains et la faune. Même si l’eau prélevée est restituée au milieu à la fonte des neiges, le prélèvement d’eau en période hivernale, lors de l’étiage des cours d’eau de montagne, alors que les précipitations se font sous forme de neige, doit être évité. Il faut donc soit acheminer l’eau, soit l’avoir préalablement stockée sur place (bassins artificiels, aujourd’hui à l’origine de 60 % des prélèvements de neige de culture). Les aménagements de stockage nécessaires transforment le paysage et l’écosystème : création de retenues, de petits barrage, etc. et l’acheminement peut être coûteux en énergie. Aucun adjuvant n’est rajouté mais a neige fabriquée par les canons à neige, 50 fois plus dure et 4 fois plus dense que la neige naturelle, a tendance à imperméabiliser les sols qu’elle recouvre et facilite le ravinement et l’érosion. Plus lente à disparaître, elle diffère aussi la saisonnalité de la fonte, qui survient désormais plus tard pour les pistes de ski qui en sont équipées. On estime que 10 millions de m3 d’eau furent utilisés lors de la saison 1999-2000 pour concevoir de la neige artificielle pendant les grandes périodes de froid propres à chaque site notamment pour apporter une sécurité à des zones exposées. Pour les stations, au point de vue législatif, mettre en place des canons à neige avec  une puissance jusqu’à 500 KW ne nécessite qu’une simple déclaration auprès de la préfecture. Au-delà, il y a tout un processus d’autorisation qui est à respecter avec l’accord de différents services de l’Etat.